CÉCILE BRIGAND

La main trace des signes, elle montre, probablement parce que l’homme est un monstre. Mais les gestes de la main transparaissent partout dans le langage . Toute l’oeuvre de la main repose dans la pensée…” nous dit-elle en reprenant les mots d’Heidegger. Et d’ajouter : “J’ai aussi parfois en tête un ouvrage du philosophe Henri Maldiney - disparu en 2013 à Montverdun - qui est un recueil dans lequel il se propose de penser ensemble l’énigme de l’humanité et l’énigme de la catastrophe qui survient à certains d’entre nous”. Articulations entre la fragilité de la vie et ce qui la menace, ses oeuvres saisissantes trouvent leur puissance et leur expression troublante dans des outils conceptuels, formels et visuels s’octroyant des détours à la fois sémantiques et plastiques. En effet, la démarche artistique de Cécile Brigand (Photo ci-dessous Crédit@DR) exporte, importe et colporte des opérations, des ordres et des conditions de détermination de la forme dans une main qui trébuche à contrecoeur et provoque l’inconnu. Elle nous parle de segmentations, de plans, de courbes et de droites faisant dialoguer allègrement des éléments hétérogènes se prêtant à de multiples métamorphoses. Le regardeur appréciera ces irrégularités, ces étagements verticaux et ces déplacements circulaires débouchant sur des creusées nées de mouvements célébrant autant la démultiplication que l’expérience temporelle du tracé. On aime tout particulièrement ces pliures côtoyant ces aplats généreux dans un brouillage fougueux et constant de la triade : main, outil, couleur. Dans une pratique de la circularité fascinante - où chute et élévation se neutralisent dans le génie de la technique mixte - faisant finalement dire ceci à Cécile dans un émouvant soupir : “L’expérience m’a montré que lorsque l’esprit est silencieux, parce que le moi est inactif : il y a alors création “.