GISÈLE BONIN
“Mon travail questionne une tension, un entre-deux qui se déploie dans une sorte d’incomplétude, visant à figurer, à incarner l’Absence et les Absents. A rappeler, donc, une présence et des Présents. La virginité de certaines feuilles me répugne…” a-t-elle un jour prononcé. Avant d’ajouter ceci : “Dessiner, c’est s’affranchir d’une certaine forme de Temps : activité de retrait, d’astreinte, de dégagement. Vers la tranquillité et vers la folie : poser les limites spatiales et le calendrier graphique de son propre désert. Silence”. Nous extirpant inexorablement de l’état confortable de paix en nous obligeant à l’impératif d’une inépuisable confrontation, ses oeuvres s’attaquent aux effacements dans des nervures franches parcourues d’une douceur saisissante. Offrant cette aération d’être et de se faire, elles creusent un réceptacle pictural dissipant toute velléité de distanciation. En effet, la démarche artistique de Gisèle Bonin (Photo ci-dessous Crédit@ArielleMaugin) nous parle de ces éléments constitutifs du corps humain et de ces agrégats d’atomes formant une nébuleuse cosmique conférant aux oeuvres une curieuse aura de radiographie. Le regardeur appréciera ces fragments de peau solitaires et ces légers effleurements de corps soulignant les préoccupations de “semblance” de l’artiste via des peaux visuelles vulnérables aux colorations translucides. On aime tout particulièrement cette pratique où abondent des paradigmes complexes et où le sujet devient en somme relatif. Pour étayer le propos, Gisèle glissera ces derniers mots : “Je n’aime pas les papiers lisses. Je les préfère épais, granuleux : il faut qu’ils accrochent la mine, lui opposent une résistance, imposent leur marque” !