THE PROJECTIVE DRAWING

DRAWING LAB PARIS au 17, rue de Richelieu 75001 Paris /// Jusqu’au 20 septembre 2019 /// Exposition : THE PROJECTIVE DRAWING

Les mondes qu’il crée, sans ébauche préalable, par l’accumulation et l’enchevêtrement de fils matérialisent les bases de nos sociétés contemporaires. Ses architectures métaphoriques - réalisées à l’aide uniquement de fils tendus et d’un pistolet à colle - répondent à des règles récurrentes permettant de façonner des compositions s’appropriant les volumes et les perspectives. “Le fil, en tant que matériau, contient beaucoup de choses : l’histoire des civilisations, l’idée de connexion, ainsi que la notion de fragilité” confie t-il. Dans une extrême économie de moyens, Keita Mori (Photo ci-dessous Crédit@DrawingLabParis-Olivier Lechat) invente des villes imaginaires et des paysages urbains illusionnistes se libérant des carcans de l’angle pour envahir totalement l’espace. Le visiteur ne pourra se soustraire à l’effet captivant du “Yarn Drawing” (dessin avec de la laine) qui oscille d’une dimension à une autre pour offrir un accent sculptural spectaculaire. Au sein de cette grande exposition collective, l’artiste distille des indices pour mieux nous indiquer de quelle manière il parvient à contraindre géométriquement la forme et à synthétiser les motifs. Il développe ici la notion de “bug report” : l’éclatement, le rapport d’erreur ou l’accident qui perturbe l’espace de construction pour détourner le geste vers de nouvelles orientations. On aime ce travail ambitieux de Keita autour de la migration et du transit qui nous conduit dans une promenade nous faisant “voir” l’architecture différemment en incluant les facettes du mental, du physique et de l’émotionnel. Le spectateur n’a pas d’autre option que d’activer ici une matrice complexe d’idées non traditionnelles. Tout en répondant à ce mantra : To think outside the box !

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POUR DERNIER TERRAIN VAGUE

Musée de l’Abbaye Sainte-Croix (MASC) - La Croisée / Abbaye Saint-Jean d’Orbestier Les Sables d’Olonne /// Jusqu’au 29 septembre 2019 /// Exposition : POUR DERNIER TERRAIN VAGUE

In the Yellow Haze of the Sun (dans la brume jaune du soleil), Le Commencent, La Chute, The Last Pieces of Westland… Autant de noms de pièces qui nous parlent du cosmos, de morphogenèse, de mémoires enfouies, de mécanisme astral mais aussi du monde physique qui nous abrite. Entre Land Art et Minismalisme, l’oeuvre polymorphe de Thomas Tronel-Gauthier (Photo ci-dessous Crédit@DR) aborde dans une gestuelle très précise la question de la relation existentielle qu’entretient l’homme avec la nature. L’idée d’une géologie - en appelant à la mémoire de la terre et de la mer - habite ce projet d’intervention dans le paysage, dans un esprit Arte Povera, via les notions d’éboulis, de chute et d’empreinte. On aime ces moulages évoquant de mystérieuses formes fossiles, sombres et brutes. Mais aussi et surtout cette cascade, dont le dessin des flots nous invite à une déambulation quasi initiatique. On a l’impression face à l’installation - métaphore de la naissance de la forme - que la nature est à l’oeuvre et de ressentir le lent mouvement des vagues. Les hybridations matérielles et opérationnelles - tout autant que le subtil protocole technique - qui se manifestent au sein de cette belle exposition personnelle confrontent la matière à l’imaginaire avec une démarche aussi poétique qu’analytique. Dans cette relation osmotique à fleur de peau, Thomas parvient ici à nous faire voir la grève, l’estran et le temps des marées. C’est cette plénitude que l’on vient chercher encore et encore. Et dont on a du mal à se défaire !

GO ZONES

Galerie de la Scep au 102, rue Perrin Solliers 13006 Marseille /// Jusqu’au 5 octobre 2019 /// Exposition : GO ZONES

Résolument figuratives et réalistes ses oeuvres sont des pièges qui saisissent et capturent le monde d’aujourd’hui dans une réalité grimaçante et une mélancolie urbaine démontrant une incapacité à réenchanter le monde. En effet, la peinture sans compromis aux notes fantasmatiques de Camille Beauplan (Photo ci-dessous Crédit@GiordanoTorreggiani) porte en elle ce geste critique qui révèle par touches choisies certaines bizarreries sans éclat du quotidien ou encore un sublime ridicule des plus saisissants. Au sein de cette exposition de choix, le visiteur percevra cette sensibilité romantique marquée par le vécu de cette jeune artiste - ne cachant pas son goût prononcé pour l’urbanisme et les espaces construits - qui livre des points de vues incisifs baignés de couleurs. Aucune mise en scène ici mais plutôt des moments et des anecdotes personnels. L’artiste nous parle de l’urgente nécessité de regarder ce qui nous entoure sans aucun pathos. On aime cette habilité à retranscrire ces infinis détails grinçants de notre société. Le signifiant trouve ici sa pleine expression dans des témoignages voguant dans des espaces intérieurs noyés de lumière et des ruines aux notes irréalistes. La cohabitation entre ces états de légèreté dans des lieux quasi abandonnés et des séquences picturales troublantes - comme soutenues par des infra-basses - fonctionne parfaitement bien. Camille embellit ici le monde dans une fantaisie faite d’heureux hasards où le mot flânerie prend tout son éclat. Et cela, c’est déjà beaucoup !

EMPIRIQUE

Galerie ALB au 47, rue Chapon 75003 Paris /// Du 5 septembre au 19 octobre 2019 /// Exposition : EMPIRIQUE

Certaines pratiques cachent ou contiennent parfois dans leurs profondeurs plusieurs voies... Tel pourrait être le préambule à cette exposition de rentrée, chez la galerie parisienne ALB, aussi intéressante que pénétrante. Car pour cet artiste les mots, les textes et les poèmes sont la matrice vitale d’une oeuvre faîte de toiles, d’écrits et de sculptures échangeant continuellement entre elles. Au sein de ce format spécifique et personnel, le langage devient la source essentielle d’une approche artistique cherchant à ouvrir un nouvel espace social. En effet, pour François Mangeol (Photo ci-dessous Crédit@BojanaTatarska) la gymnastique intellectuelle - très bien huilée il faut le mentionner - s’appuie sur un riche alphabet plastique revendiquant ce qu’il nomme un “constructivisme conceptuel”. Développé depuis plusieurs années, ses recherches autour des systèmes alphabétiques - et en particulier celui des colombages - a vocation à couper la perception immédiate du spectateur. Non pas pour arrêter le temps mais pour “marquer un temps d’arrêt” explique t-il. Les structures qu’il bâtit sont toutes des invitations à entrer dans le corpus de l’oeuvre. Le visiteur se laissera aller - sans retenue ici - aux circonvolutions de l’artiste dans une exploration aussi laconique que langoureuse et marquée par une vraie forme d’ascèse. On aime, cette esthétique singulière multi-référencée de François offrant un environnement propice à la pérégrination et à l’étonnement. Sans oublier une profondeur sémantique dans laquelle la magie du verbe est délestée de toute scorie !

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LES JOURS TRANQUILLES

Galerie PIERRE POUMET au 130, rue Notre-Dame 33000 Bordeaux /// Du 5 septembre au 21 septembre 2019 /// Exposition : LES JOURS TRANQUILLES

Ce pourrait être le nom d’une maison de retraite ou d’un camping du sud de la France. Le titre de ce solo show sonne comme une promesse de calme et d’apaisement loin des tumultes et du chaos de la ville. En effet, le thème de cette exposition contient cette ambiguïté fondée sur les notions croisées de retraite et de vacances. Car les pièces de Ludovic Beillard n’évoquent par vraiment un lieu de villégiature pour personnes âgées mais plutôt l’idée d’une personne qui décide de se retirer du monde et de prendre une certaine distance avec celui-ci. La retraite est ici envisagée dans le principe de retrouver ses gestes, de retourner à des activités qui n’ont jamais pu être achevées. L’artiste envisage sa pratique de manière empirique en se positionnant davantage du coté du collage et de l’assemblage plutôt que de la sculpture proprement dite. Le visiteur appréciera cet espace d’exposition envisagé non pas comme un white cube mais comme un fond aux allures de décor de théâtre aux paysages expressionnistes se dévoilant sous des proportions et des perspectives exagérées. Certains diront que cela se situe à la croisée des nabis et des expressionnistes, d’autres verront certainement un paysage vivant comme chez l’américain Grant Wood. On aime passionnément ces sculptures et ces murs réalisés en papier peint comme si la galerie devenait une sorte de refuge ou de grotte. A la question de la perte d’échelles inhérente au projet, Ludovic nous confie : “J’aime l’idée d’être dans un espace face à des tableaux, des gravures sur bois représentant des fenêtres donnant sur des paysages brumeux et avec des architectures sous formes de maquettes miniatures”. En somme, être à la fois en dehors et en dedans tout en se tenant à bonne distance…

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SCREEN LOVE - WAIT FOR ME

Galerie INTERVALLE au 12, rue Jouye Rouve 75020 Paris /// Du 15 septembre au 31 décembre 2019 /// Exposition : SCREEN LOVE - WAIT FOR ME

Passer d’un univers à l’autre sans arrêt. Utiliser la photographie pour appréhender l’histoire d’hommes et de femmes ordinaires. Aimer être en danger et devoir trouver une solution sur le moment. L’approche artistique de cet artiste - aimant se mettre constamment au défi - s’appuie sur une curiosité et un appétit sans limite. En effet, n’ayant jamais suivi une voie académique précise, Julien Mignot a trouvé sa propre écriture à travers notamment le monde exigeant du portrait. Sa photographie très “solaire” met en lumière, sans aucune barrière, l’intimité des personnes. Au sein de ce solo show électrique, sondant notre rapport au voyeurisme, l’artiste présente une magnifique série de 50 images associée à un dispositif sonore et vidéo. Julien photographie ici son écran d’ordinateur connecté à des webcams érotiques. Le visiteur appréciera cette image volontairement floue et incomplète. Car elle finit par flotter comme dans un monolithe. Cette dernière disparaît ensuite dans sa tranche, se déconnecte et nous renvoie à la vacuité de la relation numérique. Julien noie subtilement les pixels en se rapprochant des corps au plus près et parvient à déformer de la sorte des scènes réelles. On aime ces instantanés brutes, recupérés de tréfonds - qui sont enveloppés dans un sfumato numérique. Et qui laisse toutefois à la pudeur une chance de s’échapper de l’écran sous cette signature tendre et aiguisée qu’il résume en anglais ainsi : “My name is Julien Mignot. I am a photographer working and living in Paris. I am interested in a lot of things and I take pictures of them”. On ne saurait mieux dire.

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SUMMER GROUP SHOW

Galerie Lazarew au 14, rue du Perche 75003 Paris /// Jusqu’au 30 septembre 2019 /// Exposition : SUMMER GROUP SHOW

Ode au vivant et à une jeunesse qui se cherche, l’oeuvre de ce jeune plasticien nous parle de questionnements de l’âme autant que des tourments du corps. En effet, Sergey Kononov (Photo ci-dessous Crédit@DR) n’est pas de ceux qui tergiversent mais fait plutôt partie de cette catégorie d’artistes qui dépeignent comme aucun autre cette “force animale de la vie, cette force omniprésente du physique qui domine tout autre forme d’expression, telles que celles de l’âme, du spirituel ou de la pensée”. La présence magnétique de ses personnages à la compagnie envoûtante évoque le style dit “sévère” de la peinture soviétique de la fin des années 50. On aime le tissu pictural que nous livre - au sein ce de beau group show de l’été - ce jeune prodige qui nous séduit avec cette mélancolie sans afféterie. La virtuosité technique sans concession qui affleure s’empare des questions sous-jacentes du désarroi, de fulgurances et de beautés animales. On tire notre révérence à la galerie Lazarew qui permet au visiteur de découvrir ici un talent des plus prometteurs à la personnalité affirmée. Face à ses espaces picturaux triviaux et à l’incandescence des sujets - où la violence s’exprime en vase clos - on retient cette pensée de Sergey : “Le flou est à l’image de notre siècle, où tout se passe très vite. On fait tout pour économiser du temps et en fin de compte, on oublie de vivre”. Un statement implacable qui tiendra lieu de conclusion i

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TOUT DOIT DISPARAÎTRE

Galerie PROVOST-HACKER au 40, rue Voltaire 59000 Lille /// Jusqu’au 15 septembre 2019 /// Exposition : TOUT DOIT DISPARAÎTRE

Il se sert de la peinture pour documenter et sublimer le temps présent en y introduisant une large part d’autobiographie. La proximité nouvelle qui se dégage de ses oeuvres nous pousse à des postures méditatives et à une immersion silencieuse. En effet, les mises en scène d’Adrien Belgrand (Photo ci-dessous Crédit@DR) - aux atours cinématographiques - opèrent une forme de transfiguration. Peindre, pour cet artiste, c’est produire des images en donnant corps à un regard et de la matière à un moment. Le visiteur est vite captivé par sa capacité à neutraliser la touche et à nous montrer la volatilité des émotions. “Je n’aime pas que l’on m’impose une lecture ou un point de vue, donc je présente souvent les personnes de dos ou de trois-quarts, comme des silhouettes” précise t-il avec un léger sourire. Le lien étroit entre le sujet et le peintre trouve ici toute sa fragilité et son génie car il nous fait partager les instants de bonheur insondables et exacerbés du réel. Par ailleurs, cette amplitude vient provoquer un basculement intérieur en ouvrant des dimensions où l’arbitraire fait écho à la sphère du privé. On aime particulièrement l’amplitude des sujets traités et cette attention donnée aux détails qui émaillent chacune des pièces à l’hyperréalisme léché. Au coeur de cette grande exposition de l’été - réunissant 36 artistes et 200 oeuvres - les cinq toiles d’Adrien font rayonner la galerie Provost-Hacker qui confirme de nouveau son rang de galerie au nez creux. Enfin, nous sortons de cette rencontre avec l’artiste plongés dans des pensées faites d’interrogations sourdes et de narrations venues tout droit de cette peinture narrative à l’effet satiné. Et libérée de tout diktat !

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MASTERPIECES

Galerie Thomas Bernard - Cortex Athlético au 7, rue des Arquebusiers 75003 Paris /// Du 7 septembre au 5 octobre 2019 /// Exposition : MASTERPIECES

Dans le prolongement de la précédente, cette grande exposition collective permettra assurément de revenir sur l’histoire de cette galerie parisienne qui compte, de montrer la continuité de la valeur “cortex” pour les plus aguerris, de re-découvrir les trésors sortis des stocks mais surtout de croiser le travail de jeunes artistes de grand talent. On pense principalement à celui de Kevin Rouillard (Photo ci-dessous Crédit@DR) dont les tôles martelées à l’esthétique très conceptuelle illustrent une démarche artistique radicale rejoignant un geste de collecte mais aussi de classification. Découpée, martelée et aplatie, la tôle dans les mains de cet artiste à ne pas perdre de vue est soumise à un travail autour de l’épuisement de la matière croisant les problématiques. Se qualifiant dans leur statut par le biais de leurs titres - par exemple “Extrait tôle-choc” pour ne nommer qu’elle - ses pièces échappant au jeu des catégories évoquent une logique de recyclage et de redistribution des formes existantes. On aime cette oeuvre sans superflu, réunissant autant de monochromes que de polychromes - dans laquelle ont été posées des règles préalables nous éclairant sur les différentes variations de la matière. Et venant illustrer cette phrase clé de Kevin au sujet de son travail de la forme : “Cette chose est traitée, cette recherche enfin est aboutie”. Good job !

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MOUVEMENTS

Galerie Esther Woerdehoff au 36, rue Falguière 75015 Paris /// Du 5 septembre au 19 octobre 2019 /// Exposition : MOUVEMENTS

Son installation extérieure in situ, réalisée pour l’occasion, nous rappelle ses interventions antérieures XXL au coeur de l’espace public et privé en nous conduisant progressivement vers ses dernières séries de dessins et de peintures aux teintes vives qui habillent comme par évidence la galerie. La couleur qui explose aussitôt au sein des murs est comme diluée et suit une démarche dans laquelle la gradation participe de la naissance et de l’évolution des pièces. Car la pratique plastique d’Anne-Flore Cabanis (Photo ci-dessous Crédit@JLA) repose avant tout sur cette gestuelle au stylo très personnelle et intime au travers de laquelle la ligne dessinée à main levée ne se croise jamais. Les formes organiques concentrées - nées d’un tracé géométrique progressif - poussent indéniablement le visiteur à une contemplation vaporeuse apaisante et fertile. Le médium de la performance trouve ici toute son expression et sa justification dans ce geste lent et minutieux tout en légèreté croisant les disciplines. “Le geste crée l’oeuvre dans le temps et la répétition” précise Anne-Flore qui invite ses hôtes à une introspection totale. La circulation continue du regard accompagne simultanément le mouvement des corps en faisant s’évader la pensée. On aime également cette échappée audacieuse de la galerie parisienne évoluant durant cette parenthèse onirique hors du prisme de la photographie. Et qui ouvre, du coup, le champ de l’indicible en brisant toute idée d’entre-soi !

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TOPOR N'EST PAS MORT

Galerie Anne Barrault au 51, rue des Archives 75003 Paris /// Du 7 septembre au 26 octobre 2019 /// Exposition : TOPOR N’EST PAS MORT

Aussi à l’aise avec le pastel, que le crayon ou encore l’aquarelle Guillaume Bruère répond à l’invitation de l’incontournable galerie Anne Barrault qui réunit une vingtaine d’artistes autour de l’oeuvre de l’insatiable Roland Topor. Si cette grande exposition n’est pas un hommage à proprement parler, elle permet de se remémorer l’oeuvre impressionnante et protéiforme de celui qui se définissait comme un “travailleur du papier”. Célébrant l’esprit carnavalesque et l’esprit de dérision de l’un des dessinateurs les plus importants du 20ème siècle, Guillaume - l’un des plus jeunes artistes de ce group show généreux et foisonnant - capte ici l’attention du visiteur avec des portraits (photo ci-dessous Crédit@DR) saisissants. Dessinateur, sculpteur et performeur son travail vient illustrer à merveille cette pensée de Topor : “Je rigole du tragique, la réalité me donne de l’asthme. Je suis comme un gosse à l’école qui écrit et qui dessine, cela fait partie des possibilités humaines de salir du papier. J’aime l’art car c’est une manière d’évacuer la culpabilité et de regarder que le plaisir”… Les nouvelles oeuvres retenues ici font advenir la connivence. En faisant revenir le rire tonitruant de Topor qui disait parfois que s’il dessinait ou écrivait, c’était pour trouver des alliés. Qu’il soit rassuré pour de bon, le passant ordinaire en est un.

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MATHIEU CHAVAREN

Galerie Perpitch&Bringand au 7 rue Paul-Louis Courier 75007 Paris /// Du 12 septembre au 15 novembre 2019 /// Exposition : MATHIEU CHAVAREN : SOLO SHOW

Initialement, ce solo show devait être tourné autour de "ses sujets et ses pensées” mais finalement la thématique et la portée se sont étendues plus largement pour déborder le cadre. Une approche d’ouverture et de générosité correspondant à l’ADN caractéristique de la galerie Perpitch&Bringand à qui l’on doit cette exposition de rentrée aussi qualitative que vertueuse. La dizaine de toiles inédites de cet artiste - travaillant en parallèle sur des lithographies - dévoilent un véritable univers construit comme une grande projection mentale mêlant autant ses désirs, ses rêves que ses questionnements existentialistes . En effet, la pratique artistique de Mathieu Charaven (Photo ci-dessous Crédit@DR) fait se rencontrer sur le mode de l’écriture automatique des songes enfouis. Si bien que l’artiste nous parle, à titre d’explication, d’une écriture personnelle qu’il tendrait à l’infini. Il dit utiliser la peinture comme pour écrire ou expliquer un théorème. Dans cette accumulation de traits, d’ombres et de signes, il y a quelque chose de l’ordre du calcul mathématique ou plus précisément de l’asymptote. Le liseré qu’il laisse délibérément autour de chacune de ses toiles est sensé rappeler, selon lui, la marge d’un livre. Ce dernier est là pour mieux marquer aussi sa réflexion sur la totalité et l’absence. On aime énormément ces quelques mots qu’il nous livre très spontanément sur le départ : “Je compare mon art au ciel et si je pouvais peindre avec du vent je le ferai. Donc il me faut quelque chose pour le retranscrire… ”. Une confidence qui nous éclaire sur son usage des teintes toujours saturées du blanc et du noir. Une façon distinguée de souligner son attachement à la poésie mais aussi aux dessins d’Henri Michaux ! A bon entendeur.

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ON THE LAND OF EAGLES

Galerie Anne de Villepoix au 18 rue du Moulin Joly 75011 Paris /// Du 14 septembre au 26 octobre 2019 /// Exposition : ON THE LAND OF EAGLES

Sa série “Poems Without Borders” met en scène les slogans touristiques officiels de quarante huit nations à travers treize poèmes écrits directement sur les murs de la galerie à la façon d’un wall writing. Dans ce voyage à travers les symboles que nous propose l’artiste, est mené un examen autour de la formation des identités nationales. En effet, Alina Bliumis (Photo ci-dessous Crédit@DR) révèle ici - via des rimes à motifs - l’imagerie symbolique et suggestive abstraite cachée derrière les couvertures des passeports. Elle nous rappelle, par la même occasion, que l’immigration et le tourisme sont les manifestations les plus significatives de la mondialisation. L’artiste a étudié pour cela - dans une expoloration au long cours - toutes les couvertures des passeports existantes (195 au total) à la recherche des oiseaux utilisés comme symboles nationaux afin de les libérer de leur contexte initial. On aime ce travail subtil autour du dessin et de l’aquarelle - parfois allégoriques et satiriques - qui place l’oiseau à l’intersection de la nature et de la nation. L’interprétation ouverte que peut faire le spectateur permet de rompre avec les stéréotypes et le folklore du symbolisme animalier pour franchir les frontières géographiques et entrer de plein pied dans le champ de la géopolitique. En dénicheuse de talents, la galerie Anne de Villepoix invite - au coeur de cette exposition passionnante - à se confronter sans filtre à la question des définitions ethniques et culturelles. Un rendez-vous artistique de premier ordre où l’humour et l’imagination atténuent par moment la réalité tragique de certains des théâtres concernés !

www.annedevillepoix.com

CABINET DA-END 09

Galerie Da-End au 17 rue Guénégaud 75006 Paris /// Du 15 septembre au 26 octobre 2019 /// Exposition : CABINET DA-END 09

Touchant autant à la temporalité du vivant qu’à celle du minéral, la pratique artistique de cette jeune artiste fait dialoguer la roche, le papier, les cellules colorées, des fragments d’ossements, la peinture dans une interaction reliant le monde artistique et l’univers scientifique. “Mon travail dépend de l’expérimentation, du hasard et des accidents” rappelle l’artiste qui donne vie à des compositions réunissant des graines, de la colle, du verre ou du papier dans des croisements fondés sur une série de mythes et de croyances. Dans la lecture qu’elle fait des pierres, Marion Catusse (Photo ci-dessous Crédit@Keffer) s’en remet à l’immuabilité du minéral. Son dernier projet de sculptures “Résilience” construit autour du verre brisé, de l’or et de la technique japonaise de Kintsugi sera présenté en septembre prochain au sein du Cabinet Da-End. Il s’inscrit dans le prolongement des deux précédents - intitulés “Lire les pierre de plus près” et “Pierre contre nature” - qui font s’exprimer sur une structure en aluminium des photographies au microscope et des impressions sur papier japonais. La présence de résine, de feuilles d’or, d’argent et de cuivre anodisés souligne le degré d’expérimentation faisant converger la poétique du vivant et le registre ontologique . On ne peut s’empêcher de songer - en se tenant à bonne distance de tout écueil ésotérique - à cette citation de Gaston Bachelard : “La science se forme plutôt sur une rêverie que sur une expérience et il faut bien des expériences pour effacer les brumes des songes”. Une exposition qui renverra certains sur les questions actuelles de la génétique, de l’astrophysique, des biotechnologies ou de l’entomologie. Attention tout de même aux réactions chimiques incontrôlables au sein de cet édifice et de ce socle cosmologique imprévisibles !

www.da-end.com

GRIMACES

A la galerie DEROUILLON au 38 rue Notre Dame de Nazareth 75003 Paris /// Du 5 au 21 septembre 2019 /// Exposition : GRIMACES

Ne pas vouloir être dans la démonstration, mais chercher plutôt une certaine tension…” Les propos de cet artiste ultra doué aimant à faire cohabiter sur ses toiles différents thèmes et associations visuelles nous renseignent sur les rapprochements formels qui dictent son travail. Ils questionnent le sens critique dans une approche cognitive fait de protestation, de convictions et de fougue. Fabien Boitard, ose dans une manière bien à lui un mode de représentation vibrant du monde fait de profondes rêveries et de pensées aussi grinçantes qu’ardentes émanant d’une perspective affective éblouissante. A travers cette exposition personnelle captivante, la galerie Derouillon nous fait partager ici avec brio ce savant sfumato dont l’artiste fait la démonstration. Faisant surgir l’inattendu, sous formes de touches cadencées et énigmatiques, Fabien s’impose comme un artiste à suivre de près. On aime cette lecture polyphonique de l’image et cette subjectivité exacerbée faisant se chevaucher les images. Une rencontre à la confluence des paradoxes qu’il étaye avec force ainsi : “Jaime que ma peinture fasse réagir !”. Mission accomplie !

www.galeriederouillon.com

HARMONY OF CHAOS

A la galerie Thierry BIGAIGNON au 9 rue Charlot 75003 Paris /// Jusqu’au 31 août 2019 /// Exposition : HARMONY OF CHAOS

La vibration et l’étouffement qu’il a ressenti dans les rues de Shanghai sont ici dépeints dans un changement d’échelles qui marque un tournant et un nouveau chapitre dans son approche artistique. L’ expérience sensorielle de cette nouvelle série atteste d’un vocabulaire particulièrement maîtrisé. L’italien Renato D’Agostin affirme avoir découvert dans ce projet dense de nouvelles possibilités en photographie. En effet, la grammaire qu’il décode ici - jusqu’alors inexploré - nous parle de mutations urbaines mouvantes et de perspectives post-modernes furtives. L’artiste a poussé ici le processus de développement à l’extrême en exposant sur une feuille de papier une multitude de vues issues du même négatif pour recréer cette sensation de ruche en mouvement perpétuel. Le visiteur éprouve de manière palpable certaines sensations de claustrophobie traduites grâce à l’agrandisseur de la chambre noire hors-norme de Renato. On succombe à ces grands tirages qui révèlent avec intensité ces abstractions cimentées et ces apparitions accompagnant cette chorégraphie du silence. Mais aussi à ces brumes semblant extraites de décors de théâtres de Broadway !

www.thierrybigaignon.com

POINT 0

Galerie Liusa WANG au 15 Boulevard Saint-Germain 75005 Paris /// Du 13 septembre au 25 octobre 2019 /// Exposition : POINT 0

Elle expérimente de nouvelles formes, diversifie ses supports et mixe les médiums. L’art, pour elle, est d’abord une performance dans laquelle le corps et le temps sont intimement liés. Au cours de cette “investigation” quasi médicale, elle se focalise sur cette zone de contact qui entoure le corps. Cette grande liberté que la jeune artiste chinoise Zhao Duan (Photo ci-dessous Crédit@DR ) cultive, trouve son essence dans le trouble des représentations corporelles qu’elle établit au travers de portraits saisissants. Les trois nouvelles séries - dont “Dictée” et “Voyage sans retour” - restituent à merveille cette notion du temps que l’artiste explore dans une répétition infinie de gestes mécaniques. Le visiteur est captivé par ce processus de création, au croisement des médiums, sollicitant le corps et dans lequel l’artiste est en quête constante de nouvelles expressions plastiques. La galerie Liusa Wang révèle ici une pratique évoquant un voyage initiatique répondant à cette seule et unique devise : “Je peins avec la vitesse, et le temps est transformé en forme”. Ici le corps devient le médium qui crée les motifs. Et cela nous comble de joie !

www.galerieliusawang.com

NOTHING IS OLD BECAUSE...

Gb AGENCY au 18 rue des Quatre-Fils 75003 Paris /// Du 7 septembre au 5 octobre 2019 /// Exposition : NOTHING IS OLD BECAUSE WE ARE TOO YOUNG

Les traits de ses tableaux sont toujours réduits au strict minimum pour mieux explorer le thème de l’existence humaine tout en soulignant un sentiment d’aliénation où se mêlent humour et solitude. Face à ses toiles porteuses de scénarios de la vie quotidienne - et empruntant à l’espace scénique théâtral et au cinéma des années 50 - Apostolos Georgiou fait acte d’ironie et de distance. Au sein de ces petites histoires, à la structure austère et à la stabilité précaire, dépeignant les mythologies de la vie, l’artiste décrit des situations parfois absurdes sans échappatoire. On ne peut détourner l’attention de cette peinture laconique où les postures semblent se plier à la surface de la toile et où les états de renonciation croisent l’ introspection. On aime ses figures recluses dans un enfermement mental et pictural qui prennent forme sur ce canevas libre évoquant la tradition de la peinture grecque. Noyées entre l’euphorie et le doute, les pièces laissent l’imagination du spectateur prolonger agréablement la narration. La galerie Gb Agency nous invite ici à nous confronter à la théâtralité de ces scènes énigmatiques et familières qui s’offrent au regard comme sous la forme d’un challenge métaphysique. A l’occasion de cette exposition de septembre, Apostolos se livre à son public par ces mots : "On ne peut pas choisir ce que l’on est, mais on doit accepter qui l’on est. Je sais pertinemment que la solution, la grande aventure pour toute sorte d’expressions se cache derrière les idoles, les mots et les sons.” Une exposition toute en justesse dont nous sortons immanquablement grandis. Amen !

www.gbagency.fr

TO EAT OR TO BE EATEN

Galerie SEMIOSE au 54 rue Chapon 75003 Paris /// Du 7 septembre au 5 octobre 2019 /// Exposition : TO EAT OR TO BE EATEN

Passé maître dans la sculpture par taille directe de figures de pierre, cet artiste passionné par les héros de la mythologie grecque nous convie à une exploration sans atermoiement du réalisme médiéval. Au coeur de son univers prolifique se manifeste un imaginaire archaïque fait d’animaux et de monstres fantastiques renvoyant à des cultures et des époques différentes. En créateur éclairé de cette faune bigarrée, costumée et masquée, Stefan Rinck (Photo ci-dessous Crédit@A.Mole) s’empare de contes populaires du Moyen-Age où l’art roman se décrypte aux travers d’évocations de chimères ou de processions issues de fêtes religieuses. L’artiste se risque parfois - et c’est tant mieux - à des écarts aventureux en reprenant des formes d’expression figuratives de fantasmes de la culture collective. On aime ce langage de la pierre et cette psyché à l’humour mordant du comique vitaliste qui demeurent - d’une pièce à l’autre - aussi solides que souverains. Le visiteur cède en définitive aux obsessions gothiques de Stefan se profilant et se cristallisant de manière romantique dans la démesure de figures de l’hybris. Le propos met en garde face à une certaine forme de “barbarie du progrès” et à une primitivité du langage. On ne peut que souscrire à l’audace de la galerie Semiose qui nous renvoie, avec cette magnifique exposition de rentrée, sur le terrain de l’anthropologie, du modernisme et du vertige artistique !

www.semiose.

SOUS LE VOLCAN

Galerie Chez VALENTIN au 9 rue Saint-Gilles 75003 Paris /// Du 6 septembre au 6 octobre 2019 /// Exposition : SOUS LE VOLCAN

Ses collaborations antérieures avec des architectes ou plus récemment avec des poètes témoignent du large spectre créatif de cette artiste portée par les mots. A travers chacune de ses pièces - à la composition incisive rappelant rappelant dans le découpé les formes oblongues colorées des grands paysagistes - le dispositif coloriel et formel nous dit que le tableau fait bloc. Difficile d'échapper, en effet, aux obsessions et à l’aura réconfortante d'Isabel Michel ou encore à ses paysages hallucinatoires évoquant parfois des décors futuristes des années 70. Cette lectrice impénitente - qui nous livre son amour pour ses « livres peints » accompagnant les textes d’Emily Dickinson, de Sylvia Plath ou de Michel Butor - ne se prive pas de nourrir l'oeil avec une petite dose de figuration. Dans cette abstraction paysagère, parcourue de formes biomorphes, elle cherche une synthèse. Le visiteur accompagne cette mise en équation où « tout doit tomber juste et vivant » selon les mots de l'artiste. On salue le travail de la galerie Chez Valentin qui accompagne l'oeuvre minutieuse d'Isabel engagée dans une genèse longue et un balancement intérieur faits d’ incertitudes. A rebours de fulgurances ou d'éructions pulsionnelles sans corps ni âme, son œuvre nous donne cette définition de l'acte de peindre par ces mots : « Etre sous l'emprise de cette sensation très forte habitée par les couleurs et les formes ». Délicieux.


www.galeriechezvalentin.com