MIREILLE BLANC

Je travaille avec une matière épaisse, une patte et j’aime bien être justement à l’entre-deux avec une matière qui pourrait presque être un peu à la limite de l’admissible dans le sens où c’est pas une peinture lisse et il y a là quelque chose qui pourrait tendre vers la croute ou comme les sujets peuvent être à limite d’une forme de mauvais goût avec des objets volontairement kitsch et désuets…” a-t-elle confié dernièrement. Et d’ajouter : “Pour moi l’un des enjeux de la peinture c’est que tout ne se livre pas immédiatement et qu’un doute persiste, qu’il y ait une retenue des images et que le regardeur ne sache pas immédiatement de quoi il s’agit.” Habitées par un sentiment de perte et de sujet qui échappe, ses oeuvres épuisent l’image et fonctionnent dans un processus de plusieurs mises à distance successives par rapport à un objet ou une photographie pris comme point de départ. Puisant leur sens dans la quotidienneté et la banalité du quotidien dont ils extirpent les détails, ses travaux nous parlent d’objets porteurs de failles qui fascinent autant qu’ils dérangent l’artiste. En effet, la démarche artistique de Mireille Blanc (Photo ci-dessous Crédit@VincentFerrane) livre une forme d’étrangeté des objets qui vont être un moment repeints et où un élément en céramique très chargé et très dense peut être “rejoué” avec l’huile avec une matière à la fois épaisse, pâteuse et crémeuse. Elle aborde la question de la finitude avec des objets en proie à leur propre disparition. Le spectateur appréciera ces toiles où le sujet peine à apparaître dans des zones d’indiscernabilité créant des doutes et une tension saisissante. Mais aussi ces récurrences non préméditées appartenant au registre du “passé commun” dans la tonalité du gris prise comme tonalité affective de la mémoire. On aime tout particulièrement cette approche nous renvoyant à cette forme d’image-mémoire dans une peinture indicielle et des univers fragmentaires. Où les indices ne posent pas la question du récit mais célèbrent plutôt des formes de “suspend” soulevant la question du sens à travers la monstration !