LÉO DORFNER

Ce qui m’intéresse, c’est la peau. J’aime aussi que les choses s’affrontent, marier l’humour, la poésie et le trash, allier l’hyper technique à la technique…” a-t-il confié un jour. Et d’ajouter : “Je suis né dans le 13ème arrondissement un 25 décembre, comme Jésus. J’ai été conçu dans l’immeuble même où l’on se trouve, vers Maison Blanche : comme Barack Obama. Je suis un pur urbain, la nature ça me fait paniquer et les animaux sont faits pour être mangés”. Marquées par une belle impertinence du regard, ses oeuvres évoquent autant le risque de la tabula rasa que celui de la désillusion du sens dans une narration éclatée et une économie anarchique des images. Renvoyant à des divinités d’un autre temps, elles s’approprient de manière saisissante le spectre des sources iconographiques dans des leitmotivs accompagnant - sans vains bavardages - l’ impénétrable question de la métamorphose des identités et celle - tout aussi insondable - de l’impermanence des destinées humaines. En effet, la démarche artistique de Léo Dorfner (Photo ci-dessous Crédit@RenaudMonfourny) nous parle d’une esthétique du fragment et d’une authenticité du désir où le jugement n’existe pas et où seul est peint le réel. Elle nous dit aussi que la performance est très souvent empreinte de vacuité et de vanité. Le regardeur peut apprécier dans la gestuelle du plasticien ce refus à faire croire qu’il existe un arrière-monde, une métaphysique qui sous-tendrait inéluctablement une oeuvre. On aime tout particulièrement cette pratique protéiforme nous rappelant que l’art qui ne fait pas usage de concept n’est pas forcément faible. Et qu’il n’est pas toujours obligatoire de se montrer réactionnaire pour se soustraire à la règle et être subversif. Rockn’Roll !

HEAVEN

Au 24, rue Beaubourg 75003 Paris /// Jusqu’au 21 mars 2020 /// Exposition : HEAVEN

Les titres de mes oeuvres fonctionnent comme des excitateurs indiciels. Ils n’expliquent pas, ne décrivent pas, au contraire ils installent l’incertitude…” expliquait-elle dernièrement. Et d’ajouter : “Je n’affirme rien, n’insinue rien et ne revendique rien. Je reste en retrait”. Peignant des images de substitutions parfois étourdissantes, ses oeuvres acquièrent des capacités de divulgation saisissantes et nous parlent d’une vision débarrassée de préjugés et d’acquis. En effet, la démarche artistique de Domitille Ortès (Photo ci-dessous Crédit@DR) aborde ces espaces de déviation et de grâce où le dicible se laisse aller sans fausse note au simulacre et prend alors la forme d’une confondante réalité casuelle. Elle dépeint des sujets ambigus à travers lesquels l’image-incarnation revendique sans vergogne son pouvoir émancipateur. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce superbe duo show - ses toiles le confrontant aux facteurs du doute et à l’idée d’un paradis forcément illusoire, notamment face à la figure troublante d’Alana Thompson : cette jeune fille de 6 ans devenue - du jour au lendemain - le personnage d’une émission de téléralité populaire aux Etats-Unis entre 2012 et 2014. On aime tout particulièrement cette oeuvre, représentation catégorique de la famille - intitulée “C’est alors que j’entends le cri d’un oiseau” qui nous fait presque entendre le clic de l’appareil photo dans les secondes suivant la pose. Et qui nous renvoie instinctivement à cette autre oeuvre toute aussi intrigante baptisée “Dear Family, Family Life” !

www.24beaubourg.com

THE EARTH, THE TEMPLE AND…

A la galerie Marian Goodman au 79, rue Temple 75003 Paris /// Jusqu’au 18 mars 2020 /// Exposition : THE EARTH, THE TEMPLE AND THE GODS

Je faisais des recherches sur les premiers procédés photographiques depuis de nombreuses années quand j’ai décidé de développer Julia Mamaea en adaptant un procédé d’impression du XIXè siècle, le collotype pour lequel j’ai substitué la teinture colorée à l’encre lithographique…” a-t-il confié dernièrement. Et d’ajouter : “Cette technique a produit des teintes aqueuses allant du turquoise au lavande jusqu’au saumon”. Ses oeuvres soulignent l’impossibilité actuelle à prétendre à une quelconque originalité, toute oeuvre n’étant que la citation d’autres. Dans un procédé formel associant l’art conceptuel à la photographie, il explore la notion de scepticisme dans des techniques qu’il a lui même mises au point. En effet, la démarche artistique de James Welling (Photo ci-dessous Crédit@ValentinCaron) établit une continuité temporelle dans des récits fictifs entre des référents ayant parfois plus d’un siècle d’écart. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce remarquable solo show - ses travaux évoquant le début de l’imaginaire photographique de la Grèce via des expéditions archéologiques - relevant autant de la folie que de l’exploit - dans des tonalités de rouges sombres et de jaunes ardents. On aime tout particulièrement cette pratique portée par ces teintes saisissantes et ces contrastes conférant au médium le pouvoir de remonter le temps. Et faisant dire à James ceci : “L’effet cumulatif de ces multiples Julia était troublant. Il me semblait que son vêtement, son regard, son genre même, étaient devenus fluctuant, changeant de façon spectaculaire d’image en image

www.mariangoodman.com

HELMET OR NOT HELMET

A la galerie Jérôme Pauchant au 61, rue Notre Dame de Nazareth 75003 Paris /// Jusqu’au 25 avril 2020 /// Exposition : HELMET OR NOT HELMET en collaboration avec les Editions Dilecta

J’engage une réflexion sur le signe, la forme et la plasticité des représentations. En affublant une voiture de sport d’une tourelle factice de char d’assaut, je procède à l’hybridation de deux archétypes fortement identifiables et puissamment connotés dans un dispositif propre au simulacre…” explique t-il. Et d’ajouter : “Envisagé comme une parure, un costume de scène, l’attribut de mousse parasite la perception et modifie ostensiblement le regard porté sur cet objet composite”. Détournant l’axiome automobile, ses oeuvres accueillent des oxymores, des pictogrammes et des formules d’emprunt impérieuses révélant un langage singulier magnifiant les scarifications de la pièce dans une confrontation des genres qui sédiments la pluralité des références. En effet, la démarche artistique de Bruno Rousseaud (Photo ci-dessous Crédit@FabriceGousset) repose sur un principe de déclinaisons révélant aussi bien le hurlement de 300 cv dans le col de Turini, le rugissement du V12 que la jouissance venue des traces de courbes parfaites laissées sur le bitume par une R12 Gordini. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce passionnant solo show - ces dessins, installations et sculptures performatives dévoilant une réflexion portant sur ce que peuvent signifier les images à travers les notions d’identités, de hiérarchies, d’expressions ou de classements. On aime tout particulièrement cette pratique tournée vers les canons de beauté, les pratiques d’apparat militaires, les leurres et l’impact des images sociales. Mais aussi la puissance prophétique et furtive extraite de la trivialité du quotidien dont l’artiste s’empare pour mieux en extraire les subterfuges !

www.jeromepauchant.com

LES CHAMPS DES POSSIBLES

A l’ar(T)senal au 13, place Mésirard 28100 Dreux /// Du 4 avril au 1er novembre 2020 /// Exposition : LES CHAMPS DES POSSIBLES /// Commissariat : Lucile Hitier

Mon rituel de création passe par le tri, le classement, l’assemblage, l’ajout, l’accumulation, l’envahissement, la répétition, l’unification et enfin le vécu…” a-t-elle expliqué un jour. Et d’ajouter : “J’évoque les notions d’évolution, d’hybridation et d’infini”. Se situant principalement autour de la mémoire collective et personnelle, ses oeuvres nous parlent de fiction, d’autobiographie, de matière aussi de l’espace et du temps. Elles tentent de réanimer un passé en accumulant les données qui lui sont afférentes. En effet, la démarche artistique de Louisa Raddatz (Photo Ci-dessous Crédit@DR) se formule à travers l’idée d’un ”passage” ou d’un moyen de vivre sans décalage “une sur-vie”. Proposant en quelque sorte une “renaissance”, l’artiste cherche à reconstituer un passé éteint par l’inscription récurrente d’une forme d’archéologie obsessionnelle. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette exposition collective réjouissante - ses travaux offrant une réalité survivant à la disparition progressive de la mémoire et nous invitant au recueillement. Il interagira avec les oeuvres dans un cheminement autour de l’identité via l’installation “Chaîne Génétique” assez abstraite du cheveu dans son caractère organique renvoyant à une recherche d’ordre anthropologique : “ Dans beaucoup de cultures on attribue un pouvoir magique au cheveu. Certaines tribus africaines considèrent le cheveu comme une plante extériorisant l’âme…”. On aime tout particulièrement cette pratique de la plasticienne qui fait écho au Livre des Juges en accordant aux mèches déposées par le regardeur une pensée matérialisée et incarnée !

www.dreux.com

LA VIE SILENCIEUSE

Au Centre d’Arts Plastiques d’Aubervilliers (CAPA) au 27 bis, Rue Lopez et Jules Martin 93300 Aubervilliers /// Du 14 mars au 5 avril 2020 /// Exposition : LA VIE SILENCIEUSE /// Commissariat : Juliette Fontaine

Je m’intéresse à nos façons de représenter le territoire, de le saisir et de se l’approprier…” expliquait-il dernièrement. Et d’ajouter : “J’interroge les relations des individus au paysage, en vue d’un voyage et d’y projeter son imagination”. Ses oeuvres nous parlent autant de décroissance photographique, de bouleversements de nos perceptions que de mutations de territoires. Mais également de récits, de mémoires troubles et d’éléments microscopiques nécessitant le travail implacable du regard. En effet, la démarche artistique d’Harold Guérin (Photo ci-dessous Crédit@DR) livre des captations faites de messages aux contours critiques et des écarts internes dévoilant des zones en proie au renouvellement permanent. Mais aussi une vulnérabilité entropique dévoilant l’objet dans son caractère secondaire et a-fonctionnel. Le visiteur appréciera ici, au coeur de ce très beau group show - ses travaux aux paysages accidentés autour du relief où résonnent les perturbations et la dimension conceptuelle via des dispositifs saisissants. On aime tout particulièrement cette pratique nous invitant sur les traces d’un nouveau réel rendant grâce à l’échantillon et à l’infime détail. Et qui met de surcroit en relation les infrastructures avec des outils de vision pour mieux dire ces phénomènes nés de l’éphémère ou venus des sphères de l’imprédictible !

www.capa-aubervilliers.org

BEYOND PAINTING

Galerie By Lara Sedbon - en collaboration avec Raphaël Durazzo - au 126, rue de Turenne 75003 Paris /// Jusqu’au 19 mars 2020 /// Exposition : BEYOND PAINTING

Je m’inspire et mets en scène des tableaux choisis de Francis Bacon en construisant un décor en studio et dirigeant les acteurs dont je peins préalablement le corps pour introduire la dimension temporelle…” a-t-il expliqué dernièrement. Et d’ajouter : “Au début de mon travail sur cette série, je ne comprenais pas pourquoi le corps n’ n’appartenait plus à l’espace.” Ses constructions plastiques sont autant de tentatives exploratoires pour utiliser le corps comme véhicule de libération. Elles revêtent une dimension autant éducative, politique qu’activiste parfois dans une quête d’immanence saisissante. En effet, la démarche artistique de Michel Platnic (Photo ci-dessous@DR) exacerbe l’influence du récit biblique sur notre système de représentation jusqu'à en faire son unique référentiel et même la grille de lecture du monde présent. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette remarquable exposition parisienne - trois séries tendant à fondre réalité et fiction dans des oeuvres narratives et un changement de perspectives où l’artiste fait face à la fragilité de sa condition humaine. On aime tout particulièrement la puissance visuelle de ce “Genesis 12” et de cet “After Triptych 1983” nourris tous deux d’intertextualité. Mais aussi ces espaces d’expression connexes dénués de hiérarchies et de système de valeurs !

LES CHÂTEAUX DANS…

Au Musée des Beaux-Arts d’Arras - Abbaye Saint-Vaast au 22, rue Paul Doumer 62000 ARRAS /// Jusqu’au 4 mai 2020 /// Exposition : LES CHÂTEAUX DANS L’HEURE BLEUE /// Commissariat : Mélania Rossi en collaboration avec Mélanie Lerat.

L’histoire du Christ a une grande influence sur ma poétique et L’Eglise est devenue pour moi un modèle de contemplation…” a-t-il confié un jour. Et d’ajouter : “La mort est une énergie positive, elle me tient en éveil”. Ses oeuvres explorent la question de la métamorphose et de la cognition en interrogeant sa propre relation à la connaissance dans un dialogue entre perception et entendement. Inscrivant les pensées humaines par-delà la mort, elles expriment une simplicité expressive - non sans remoud - à travers un jeu de confrontation entre hommage aux maîtres Anciens et quête pulsionnelle du “guerrier de la beauté”. En effet, la démarche artistique de Jan Fabre (Photo ci-dessous Crédit@DR) est parcourue de tableaux étranges dans une noirceur parfois aussi jouissive que dérangeante fustigeant autant la prédation des richesses que les calvaires des faibles face aux puissants. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette superbe exposition - ces travaux saisissants s’appuyant sur cette heure de la levée du jour où les formes échappent à leur contour pour se noyer et diffuser leur présence dans un bleu profond : cette fameuse “heure bleue”. Dans cet entre-deux propice à l’apparition, il jugera de dessins au bic de tailles variées évoquant ces instants de “silence sublime”. On aime tout particulièrement cette pratique nous permettant d’accéder à ce moment fragile se situant entre le sommeil des animaux nocturnes et le réveil de leurs homologues diurnes. Faisant dire à l’artiste ces quelques mots : “ Je dois écrire dans mon journal de nuit ! Pour que mon crâne puisse se refroidir et que mon cerveau se remette en place

www.arras.fr

L'AVANT DERNIÈRE VERSION...

Au MAC VAL Place de la Libération 94400 Vitry-Sur Seine /// Du 7 mars au 30 août 2020 /// Exposition : L’AVANT DERNIÈRE VERSION DE LA RÉALITÉ /// Commissariat : Julien Blanpied et Frank Lamy

Décalquer le contour d’une île, c’est aussi suivre le mouvement des vagues qui battent la plage et la falaise, c’est tenter de figer une limite fugace, alors que le territoire est en modification permanente, qu’il n’est jamais acquis en tant que tel…” aurait un jour expliqué le tandem. Leurs oeuvres nous parlent de l’enfermement dans une réflexion sur le temps intégrant sa perception, son déroulement et ses liens à l’espace. Elles condensent des narrations enchevêtrées nous invitant à expérimenter des failles spatio temporelles autour d’une méditation sur la disparition programmée de toute chose. En effet, la démarche artistique de David Brognon et Stéphanie Rollin (Photo ci-dessous Crédit@Dirtymonitor) ancrée dans le réel manipule le matériau sociétal brut et capte des moments existentiels. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette remarquable exposition monographique - ces travaux le menant dans une exploration saisissante des interstices du temps en s’interrogeant sur la façon de donner une forme à l’expérience de la durée. On aime tout particulièrement cette pratique combinant des faits, des anecdotes et objets a priori disjoints. Et qui déroulent des lignes de fuite retraçant la persistance dans l’histoire de l’Humanité !

www.macval.fr

DAMIEN CABANES

A la galerie Eric Dupont au 138, rue du Temple 75003 Paris /// Du 7 mars au 18 avril 2020 /// Exposition : DAMIEN CABANES RECENT WORKS

Je viens de l’abstraction. Donc, pour moi, la peinture est une histoire de formes, de couleurs, d’espace, de proportions, de valeurs. Il y a une émotion totalement intégrée purement plastique…” a-t-il confié dernièrement. Et d’ajouter ceci : “Cela dit, si une histoire s’y rajoute, pourquoi pas ? Mais je ne suis pas littéraire”. Exprimant la rapidité du geste dans un résultat final disant le calme et l’attente, ses oeuvres font émerger la mélancolie sans jamais devenir tragiques. Et nous disent que sa peinture vient du bras tandis que ses sculptures, elles, font appel à la main, à l’articulation des poignées et des phalanges. En effet, la démarche artistique de Damien Cabanes (Photo ci-dessous Crédit@DR) nous invite sans complaisance à fermer les yeux pour voir un monde qui disparait et des présences apaisées dans des territoires picturaux exprimant cette “chose humaine supposée complète” et pour cela, “infailliblement défectueuse”. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce superbe solo show - d’impressionnants “tourbillons” posés au sol, une troublante “pagode”, de saisissantes sculptures non colorées et émaillées ainsi qu’un grand mur de gouache avec un enfant endormi. On aime tout particulièrement ces travaux nous parlant de “choses transcendantes qui se passent”. Ceux d’un homme solitaire saisissant le tressaillement miraculeux des existences !

www.eric-dupont.com

DERRIÈRE LES PAUPIÈRES

A la Bibliothèque Nationale de France Quai François Mauriac 75013 Paris /// Du 28 avril au 26 juillet 2020 /// Exposition : DERRIÈRE LES PAUPIÈRES /// Commissariat : Cécile Pocheau-Lesteven

J’ai cru un moment donné que le sujet commandait ses techniques, je me suis rendue compte que non : les choses s’inversent, se multiplient dans une technique cinq ans après ailleurs, autrement, en plus grand, en plus petit, en plus précis, en moins précis. Finalement le sujet importe peu, ce qui importe c’est la présence au moment et la relation à l’art” a-t-elle expliqué un jour. Et d’ajouter : “Ma peinture est heureuse mais inquiète beaucoup les gens”. Marqué par la dualité, son univers fait cohabiter humour et gravité, force et vulnérabilité ou encore angoisse et merveilleux. Dans des changements d’échelles et des cadrages saisissants, il réunit des fragments, des figures animales et des formes hybrides dans une intériorité silencieuse. En effet, la démarche artistique de Françoise Petrovitch (Photo ci-dessous Crédit@HervéPlumet) outrepasse les catégories temporelles dans une gestuelle laissant transparaître de manière souvent métaphorique des relations fusionnelles mère-enfant dans l’invention de mondes où règne le mystère. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette superbe exposition dédiée à son oeuvre graphique et imprimée - des estampes entre gravures, sérigraphies, lithographies et livres d’artiste mettant en lumière des jeux d’associations et de contre-points aussi subtiles que pudiques. On aime tout particulièrement ces atmosphères évoquant des attitudes face au monde et ces séries de croquis saisis sur le vif dans une relation à l’autre volontaire !

www.bnf.fr

PRESQUE

A la galerie Dohyang LEE au 75, rue Quincampoix 75003 Paris /// Jusqu’au 7 mars 2020 /// Exposition : PRESQUE

Mon travail prend sa source sur le terrain du loisir et des pratiques populaires. Je prélève des éléments ordinaires pour explorer leurs limites sémantiques” a-t-il confié un jour. Et d’ajouter au débotté cette suprenante citation d’Aristote : “Il faut jouer pour devenir sérieux”. Ses oeuvres font de l’erreur, de la collision et de la rencontre préméditée leur matière première et se formulent dans une résistance affirmée à la société de consommation. Dans un éloge de l’échec, elles interrogent la place de l’homme dans une société où règne la compétition et la course au rendement. En effet, la démarche artistique de Thomas Wattebled (Photo ci-dessous Crédit@DR) nous parle de contre-performance en mettant à l’épreuve notre perception tout en nous disant que la réalité est parfois un faux trompe-l’oeil. Le plasticien nous confronte - dans un corpus d’oeuvres allant de la performance à la sculpture et la photographie - à ce sentiment de ne pouvoir rien ajouter au sentiment ou encore à ce plaisir de perdre le plaisir lui-même. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce superbe solo show - ces sculptures totémiques saisissantes en béton blanc allégé, acier, protéines Whey Vanille, colorants, acier chromisé et pinces papillon. Mais aussi cette mystérieuse et romantique fontaine hermétique prénommée ”Chagrin” faite de zinc et de plomb faisant le trait d’union entre ces deux symboles : la victoire et la détresse. Et nous renvoyant au ridicule du corps parfait et à l’insatisfaction du corps glorieux dans un entre-deux où le “presque” emprunte au drôle pour finalement devenir idéal !

www.galeriedohyanglee.com

LOBODY NOVES ME

A la Fondation d’Entreprise RICARD au 12, rue Boissy d’Anglas 75008 Paris /// Jusqu’au 28 mars 2020 /// Exposition : LOBODY NOVES ME /// Commissariat : Eric Troncy

J’ai peint deux tableaux avec les soeurs Deneuve, à des âges différents mais qui tiennent la même pose, sur une barrière. Les histoires de soeurs, qui plus est des jumelles, me touchent beaucoup, elles irriguent tout mon travail...” a-t-elle expliqué un jour. Et d’ajouter : “J’entretiens un rapport à la caricature depuis longtemps. J’ai fait beaucoup de caricatures de la série Dallas dans les années 80. A l’époque, je faisais même des caricatures des animateurs de jeux télévisés dans les rubriques de Libé. J’adorais dessiner en regardant la TV. C’était avant internet, au début des années 80”. Ses peintures profondément sensuelles et transgressives - n’aimant pas le noir et proposant un examen des lisières entre corps et décor - font se mêler comique involontaire, kitsch, énigmes et un érotisme dont la dynamique s’articule autour du point central de la mort. Elles nous disent que le n’importe quoi, le n’importe comment tout comme le bon goût finalement varient pour chacun. En effet, la démarche artistique de Nina Childress (Photo ci-dessous Crédit@PhilippeChancel) nous parle de collisions obliques et de précaires équilibres venus d’un Pasadena lointain dans une exacerbation à l’extrême des hors-champs et de béances faites de violentes discordances, de compositions photoréalistes donnant en spectacle la liberté plastique de son médium. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette superbe exposition grinçante et impudique - ces nudies dans des versions ” good and bad” et ces embrasements picturaux faisant palpiter les peaux et battre les coeurs. On aime tout particulièrement ces désirs scopiques émanant de ces toiles aux fonds travaillés à partir de pigments de noir d’oxyde dévoilant les possibilités illusionnistes du relief. Nous retiendrons cette pensée de Nina face à l’huile sur toile baptisée Autoportrait au slip 1 : “Je fais tous mes autoportraits avec des miroirs. Pour celui-ci j’ai dû poser avec une culotte sur la tête, ce n’était pas très pratique. Je la relevais quelque fois pour mieux voir mon reflet. Ce qui fait que ma culotte était recouverte de traces de doigts verts...”

www.fondation-entreprise-ricard.com

FENCES FACES

A la galerie Danysz au 78, rue Amelot 75011 Paris /// Jusqu’au 21 mars 2020 /// Exposition : FENCES FACES

Il n’y a rien à faire à Trabiz, cette ville au nord-ouest de l’Iran où nous avons grandi. C’est une ville morne et ennuyeuse où il ne se passe pas grand chose. La seule réelle créativité artistique vient de la culture traditionnelle des champs…” ont-ils confié dernièrement. Et d’ajouter ceci : “Le graffiti et le pochoir en ont encore pour longtemps avant de faire partie de notre culture et que les gens réalisent ce que c’est réellement”. Leurs oeuvres évoquent des sujets aussi majeurs que les droits de l’homme, l’enfermement, le droit des femmes, le sort des réfugiés, le changement climatique ou encore les dérives du capitalisme. En effet, la démarche artistique des deux frères Icy and Sot (Photo ci-dessous. Crédit@DR) sèment les graines de l’espoir et de la justice sociale via les médiums de la sculpture, de la peinture, de la vidéo, de la photographie mais aussi de l’installation. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette riche exposition - ces travaux multiples à la fragilité déconcertante sensibilisant les esprits aux défis de demain. On aime tout particulièrement cette pratique à quatre mains de la fratrie qui dit vouloir essayer d’offrir au public la possibilité d’imaginer un monde meilleur en précisant : “L’impact d’une oeuvre sur la journée de quelqu’un peut être minime, mais c’est quand même un impact. Nous croyons que le rôle de l’artiste est de se faire l’avocat de la liberté “ !

www.danyszgallery.com

CARNE DEI FIORI

A la galerie TEMPLON au 28, rue du Grenier Saint-Lazare 75003 Paris /// Jusqu’au 7 mars 2020 /// Exposition : CARNE DEI FIORI

Ces fleurs qui meurent ont encore gardé leurs couleurs, leurs exubérances. Mais il y a le drame, le sentiment de l’hyper-fragilité. Le réel est en train de se désagréger, un peu comme nous, qui de beaux et jeunes, nous transformons…” avait-il confié un jour. Et d’ajouter : “Mais quand les fleurs fânent, des graines surgissent. Je voulais au départ appeler l’exposition Apocalypse, parce que étymologiquement apocalypse, c’est renaître” Repeignant la vision photographique pour contrebalancer un esthétisme de la matière en offrant au sujet absorbé ce flou matériel et sémantique, ses oeuvres nous parlent de l’ambiguïté du visible à travers une dissolution du réel. Elles expriment une réalité désincarnée et une nature indomptable qu’il a appris à regarder lors de son enfance au Bénin. En effet, la démarche artistique de Philippe Cognée (Photo ci-dessous Crédit@PhilippeCognée) aborde la question de la décrépitude autant qu’elle définit une architecture de la nature où les pétales sont des drapés et où les nervures sont des structures créant un rythme. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce solo show saisissant - ces travaux nous rappelant selon les mots de l’artiste que la peinture doit être incarnée au risque d’être de l’illustration. On aime tout particulièrement cette pratique personnelle éblouissante nous faisant voir le fer repassant la surface du tableau et cette cire réagissant très vite à la chaleur, fondant dessus et puis “se refige”. Avec, en dernière métamorphose, ces lignes des contours qui se délitent !

www.templon.com

TOUS N'HABITENT PAS...

A la galerie Florence LOEWY au 9, rue Thorigny 75003 Paris /// Jusqu’au 14 mars 2020 /// Exposition : TOUS N’HABITENT PAS LE MONDE DE LA MÊME FAÇON

Mon travail, qu’il soit pictural, photographique ou iconographique tourne autour d’une l’idée ou plutôt d’un phénomène physique : l’observation de la chute d’éléments, de leurs glissements, d’une fracture, d’un éclatement…” a-t-elle expliqué dernièrement. Et d’ajouter : “Autant de gestes qui ne représentent pas le désastre en lui-même mais signifient notre regard sur cet éventuel désastre, sont l’expression d’une sourde anxiété” Considérant les instabilités et dérèglements du monde physique et politique contemporain, ses oeuvres expérimentent un jeu de croisements d’idées dans un temps et un espace donné. En effet, la démarche artistique de Joan Ayrton (Photo ci-dessous Crédit@DR) nous parle de l’étirement comme de la suspension du temps géologique et humain à travers des questions touchant à l’harmonie, au doute et aux tâtonnements. Mais aussi des distances qui séparent l’artiste des paysages qu’elle observe pour en extraire ces moments rares d’absolue stabilité et d’immobilisme. Le visiteur appréciera ici - au sein de ce réjouissant group show - ces travaux qui évoquent le retrait progressif de la matière dans un principe de recouvrement. On aime tout particulièrement cette pratique de la plasticienne se préoccupant du temps long de la géologie et des profondeurs du monde physique mettant en jeu une forme d’annihilation et de résilience. Et qui enfouit sous la peinture le sens et la préciosité des choses. Un peu comme le fit, à sa façon, le grand dramaturge de la couleur Derek Jarman dans Slow Melody Time Old !

www.florenceloewy.gallery

ARTISTS FRIENDS RACISTS

A la galerie David Zwirner au 108, rue Vieille du Temple 75003 Paris /// Jusqu’au 21 mars 2020 /// Exposition : ARTISTS FRIENDS RACISTS

Abordant de manière frontale des sujets traumatisants dans des mouvements destructeurs et se mesurant à l’”entertainment”, ses oeuvres chahutent les esprits dans une provocation ludique et parfaitement maîtrisée. Dans une logique du “non-jugement”, elles associent fantasmagorie, humain et nouvelles technologies à travers des installations immersives à l’art combinatoire où le vernaculaire n’est jamais totalement absent. En effet, la pratique artistique de Jordan Wolfson (Photo ci-dessous Crédit@DR) nous parle via des animatroniques de cette ultra violence extraite directement de l’univers social et urbain. Le visiteur appréciera ici - au coeur de ce solo show hypnotisant - ces derniers travaux portés par la digitalisation exponentielle du réel dans une vision chaotique aussi déstructurée que virulente. Mais aussi ces sortes de chorégraphies parcourues de sampling à la façon d’un caleidoscope tapageur. On aime tout particulièrement ces hologrammes troublants dans un déluge d’hystéries innervant cet arrière-fond sadique de la pop culture. Avec en surimpression, ces mots se déversant à toute allure et venant questionner de manière géniale l’immédiateté de la signification visuelle !

www.davidzwirner.com

AUTODAFÉ

A la galerie Jean BROLLY au 16, rue de Montmorency 75003 Paris /// Jusqu’au 28 mars 2020 /// Exposition : AUTODAFÉ

A vrai dire, c’est précisément parce que les chasses aux sorcières nous parlent de notre monde que nous avons d’excellentes raisons de ne pas les regarder en face. S’y risquer, c’est se confronter au visage de le plus désespérant de l’humanité…” avait-il prononcé dernièrement en citant les mots de Mona Chollet. Mêlant des préoccupations relatives à la construction et à la mémoire, ses oeuvres nous parlent - dans une réunion d’évocations historiques et de réminiscences de la vie quotidienne - d’une certaine mélancolie portée par une poésie engagée. En effet, la démarche artistique d’Adam Adach (Photo ci-dessous Crédit@DR) aborde comme aucune autre la question de la terreur-spectacle dans un rapport à la mémoire politique saisissant. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette exposition incontournable - ces séries de dessins performatifs dont la destruction par le feu a été capturée par la photographie. Mais aussi ces peintures troublantes aux titres énigmatiques tels que “Fiesta de la fin de l’Inquisition” ou encore “Tweet de William Turner about destruction of Sodoma & Gaffa” nous rappelant que la sophistication scientifique et technologique cohabitent aujourd’hui, comme au temps de Galilée et de Copernic, avec l’archaïsme des idées. Tout en nous rappelant - face aux épisodes des persécutions inquisitoriales marquant l’histoire de l’Europe occidentale et de ses colonies - que “la beauté du feu est qu’elle détruit les responsabilités et les conséquences” !

www.jeanbrolly.com

LE SOIR DU POULPE

Au Drawing LAB Paris au 17, rue Richelieu 75001 Paris /// Jusqu’au 29 février 2020 /// Exposition : LE SOIR DU POULPE

Les écrits, c’est la seule chose dont la valeur est sûre. Les images, ça reste du maquillage…” avait-elle confié récemment lors d’une interview. Et d’ajouter : “J’aime l’idée de laisser travailler les pigments sans les contrôler”. Ses oeuvres nous relient à une mécanique céleste universelle dans des réseaux synaptiques ponctués par des lignes d’écriture exprimant des états de conscience portés par des agents picturaux et langagiers. Elles expriment par capillarité, en vers ou en prose, les différents versants d’une même réalité dans des fictions où la théologie navigue de la broderie à l’aquarelle et de la peinture à l’écriture. En effet, la démarche artistique de Lucie Picandet (Photo ci-dessous Crédit@DR) fait en sorte que la matière psychique puisse toujours se métamorphoser à travers la naissance de songes, d’images et de pulsions en interpellant ces “choses du monde” accrétées dans la durée à des techniques tissant un continent imaginaire. Le visiteur appréciera ici - au coeur de cette exposition remarquable - ces travaux de dessins dans des états intérieurs et un effondrement de la différenciation qui rend la pensée germinale dans des transmutations saisissantes. Et où le corps et l’esprit, entrant dans un rapport de légère dissonance, laissent cohabiter les objets sur un même point d’espace-temps. On aime tout particulièrement cette pratique personnelle de la plasticienne qui transgresse les intervalles du discours, hors de toute segmentation, dans un jeu de circulation du sens. Nous faisans entrevoir cette pliure sensible du signifiant faisant s’estomper puis disparaitre définitivement cette frontière tenue entre les arts plastiques et l’écriture !

www.drawinglabparis.com